Il figure au panthéon du rugby français. Du haut de ses 72 sélections, Christian Califano est l’égal des plus grands piliers de l’histoire (Leonard, Du Randt, Paparemborde). Mais ce monstre sacré n’a jamais oublié ses racines, comme il l’a prouvé en étant le parrain de la première coupe du monde amateur disputée en Provence.
Un visage, une faconde. « Cali » est un personnage, un caractère. Un homme ancré dans le rugby comme il l’était dans les mêlées, lui l’indéboulonnable pilier d’un Stade toulousain qui trustait les titres nationaux dans les années 90 (six boucliers de Brennus, sans oublier une coupe d’Europe, la première, en 1996) et d’un XV de France qui tutoyait les sommets (deux grands chelems, une demie et une finale de coupe du monde).
Le palmarès pose le gaillard ! Mais ne peut pas le résumer. « Cali », c’est surtout un gars biberonné au rugby, celui du terroir, des clochers, des copains. Il a beau avoir connu les fastes d’une carrière exemplaire, il n’a jamais coupé le cordon. « Il m’arrive encore d’aller voir quelques matchs de rugby chez les amateurs. Mais je l’annonce jamais ! Je ne veux pas me faire inviter, être en tribune avec les officiels. Je veux rester un observateur, échanger avec les gens du rugby. Ils ont tous des analyses très pertinentes ».
Encore samedi, lors de la finale de la coupe du monde de rugby amateur, il était au plus près du terrain. Et sans doute que cela le démangeait un peu d’aller pousser quelques mêlées.
Un événement dont il est le parrain. Par amitié, forcément ! Celle qui le lie à Henri Mondino, l’ancien président de la Ligue Sud de rugby. « Au-delà de notre relation, il m’a menacé en disant que si je n’étais pas avec eux, on ne me reverrait plus sur un terrain », s’esclaffe-t-il.
Parrain de ce premier Mondial amateur, Christian Califano est l’homme de terrain pour la 4ème fois pour TF1. Il reste surtout un expert avisé et un amateur (de jeu) toujours en quête de sensations.
Photo Nicolas Barbaroux
« 2027 en Australie ?… Banco »
Il le prend à la rigolade mais pas à la légère. Car ce tournoi le fascine. Avec plus de 5000 personnes dans les tribunes du stade Jean-Rolland de Digne samedi, pour la finale entre les Sud-Africains de Hamilton Sea Point et les Chiliens de Cobs & Cogs, il mesure « le chemin parcouru depuis ma rencontre avec toute l’équipe constituée autour de Jérémy (Teyssier, le président de Digne, organisateur du tournoi, ndlr).
« Ils sont partis d’une feuille blanche, avec très peu de moyens mais une envie folle. Il faut se lancer là-dedans quand même ! Ce n’est pas fou, c’est juste se dire que l’on est capable de faire de grandes choses. On a la chance d’avoir une coupe du monde chez nous, en France. Ils ont pu en profiter pour réunir toutes les forces du rugby amateur ».
« 2027 en Australie ?… Banco »
Au bord du terrain, il a pu voir évoluer les Sud-Africains, qui ont décroché ce premier titre mondial amateur, les Chiliens, les Australiens, les Français, les Tongiens et les Néo-Zélandais. Il ne boudait pas son plaisir et n’en a pas perdu une miette. « Maintenant, on ne peut pas s’arrêter là ! Les organisateurs parlent déjà de 2027, en Australie. Et bien banco ! Car au-delà de l’événement, c’est la relation entre les joueurs qui m’a marqué. Après le match entre les Français (Digne) et les Néo-Zélandais (Te Awamutu), j’ai vu les gars avec les larmes aux yeux. Ils se disaient : on l’a fait, on a joué contre les Néo-Zélandais ». Les souvenirs d’une vie pour ces joueurs qui ferraillent habituellement contre des clubs régionaux. Telle est la magie de ce mondial amateur. Un milieu qui ne le laisse pas indifférent.
L’homme de terrain de TF1
Christian Califano a connu la fin de l’amateurisme et le début d’un autre rugby. Mais pas question pour lui de les opposer. Le second puise sa réussite dans le premier.
Cali anime les mags, les avants et après match, avec Isabelle Ithurburu, sur TF1, « la » chaîne de la Coupe du monde de rugby. Photo Max PPP
« On a tous en nous la force du rugby amateur. On l’a vu avec Antoine Dupont. Lorsqu’il s’est blessé, il s’est rendu chez lui, à Castelnau-Magnoac. Il a vu un match, il s’est ressourcé. On a tous besoin de ça. Rugby amateur ou pro, c’est toujours une grande et belle famille, même si ça semble un peu naïf. Oui, j’ai gagné des Brennus, c’est formidable. Mais j’aurais voulu remporter un titre en Fédérale 3 avec mon premier club. Un Brennus, c’est fort, mais un titre chez les amateurs, c’est exceptionnel ».
Un rugby en perpétuelle évolution lui aussi. « On voit des matchs à haute intensité aujourd’hui, même en Régionale 3 ». Il n’a jamais rompu le lien avec ce rugby des territoires. Essentiel dans son rôle d’homme de terrain sur TF1, lors du Mondial, son quatrième comme consultant (2011, 2015 et 2019). Après avoir cru un temps que l’aventure allait s’arrêter, le voilà de nouveau dans ce costume. Son credo ? Toucher un public large.
« Les joueurs de l’équipe de France ? Je les ai tous vu débuter et grandir »
« Je suis dans l’explication simple, basique. Je ne veux pas partir dans des grandes théories, notamment sur la mêlée. J’en aurais pour des heures (rires) . Sur le terrain, je suis les yeux du duo François Trillo-Benjamin Kayser. J’essaie de trouver l’instant magique ».
La magie, elle, opère depuis début septembre. « Ce qui me plaît, c’est l’engouement dans les stades, avec les supporters. Tout le monde parle de cette coupe du monde ! On entend toutes les personnes dire que l’on va être champions du monde. Et tout le monde va en retirer les bénéfices, pros comme amateurs ». « Cali » aimerait bien voir ces Bleus soulever le trophée William Webb Ellis au soir du 28 octobre. En tant que passionné, supporter, ancien joueur mais aussi « parce que la plupart de ces joueurs, je les ai vu débuter, grandir. J’ai une relation particulière avec eux ».
Lui a échoué tout près du Graal. Par deux fois. En 1995, les Sud-Africains barrent la route du XV de France en demi-finale, dans des conditions particulières (la pelouse gorgée d’eau, un essai refusé injustement à Benazzi), lors d’un Mondial que les Springboks devaient gagner.
Quatre ans plus tard, un exploit contre les All Blacks les propulsent en finale, où ils échouent contre l’Australie. « Si on gagne cette coupe du monde 2023, la 10ème, on sera lavé de tout. De 1995, de 1999, mais surtout de 2011 (finale perdue d’un point contre les All Blacks, chez eux, ndlr) ». Lui mise sur une finale entre les Bleus et les Blacks, un autre pays qu’il connaît bien, puisqu’il a porté les couleurs des Auckland Blues au début des années 2000. Avec une victoire française à la clé. Foi de « Cali ».