Ancien joueur de la réserve de l’Aix Université Club, cet analyste économique de 53 ans dessine des vignettes humoristiques sur Facebook (« La vie rêvée du rugby ») et vient de publier deux livres. Il dépeint un milieu qui se prête à la « galéjade ».
Les Dieux du rugby ne se sont pas penchés sur son berceau. Ils l’ont même sacrément bien évité, par un savant cadrage-débordement. Le sport en lui-même ne faisait pas partie du vocabulaire de Jean-François Dufour. Un comble pour sa mère, professeur d’éducation physique. Alors quand à l’aube de ses 15 ans, il décide de tâter du ballon ovale, c’est un peu la sidération dans la famille Dufour,
« C’est vrai que j’étais allergique au sport, admet-il. Puis j’ai rencontré un prof de sport sympa (Jean-Pierre Couedou, ndlr) et le rugby a été une révélation. J’en ai fait 25 ans ». A Salon-de-Provence, ce Normand d’origine découvre l’amitié et les copains et le rugby, en dilettante.
Jusqu’en 1999 où, après la naissance de son fils, il s’engage avec la réserve de l’Aix Université club rugby. L’envie de se prouver quelque chose…
Avec ses 70 kg, il se retrouve même propulsé… en première ligne ! « Le meilleur gag de ma carrière ». Jeff, au cœur de la mêlée ? Même ses coéquipiers en sourient ! « L’entraîneur de l’époque (Jean-Philippe Maillé) arrive et annonce que l’on n’a pas de talonneur. Il demande si quelqu’un se dévoue. J’ai levé la main et il me répond : « bon, on n’a pas trop le choix ». J’ai compensé à la gnaque ».
Ses adversaires le voient arriver avec un regard amusé… qu’ils perdent très vite. D’où son surnom de « teigneux » qui va lui coller à la peau. Jusqu’à devenir son nom d’artiste.
Avec la réserve de l’AUC, il parviendra en finale du championnat Honneur en 2008. Une équipe dont il était le capitaine. Mais de ses 14 saisons, ce n’est pas de cette épopée dont il se souvient le plus. « J’ai côtoyé des gars très forts, d’autres très nuls, même pire que moi, mais l’état d’esprit était dingue. Peu importe les gabarits, les origines et les religions, on était là pour les autres sur le terrain. On a vécu une aventure humaine énorme. Ce n’est pas qu’une légende, c’est une réalité ». Mais l’histoire ne s’arrête pas en 2013 pour lui. Elle se poursuit crayon en main.
Raphaël Ibanez, le manager général de l’équipe de France, a apprécié le ton de Jeff.
17 000 followers sur sa page facebook
Jeff a toujours aimé dessiner, en cours, lors de réunions. Et le rugby déborde d’anecdotes ! Il crée une page Facebook « pour faire marrer les copains ». La mayonnaise prend. Aujourd’hui, « La vie rêvée du rugby » compte plus de 17 000 followers. Jeff Teigneux vient même d’éditer deux livres au mois d’août, « La coupe des mondes de rugby » et « Une saison vécue de rugby rêvé », où il reprend des vignettes publiées sur les réseaux sociaux.
« Les gens qui ne connaissent pas le rugby me disent que c’est exagéré. Mais 90% de ce que je dessine, c’est du vécu ! » Certains anciens coéquipiers se reconnaissent même dans les personnages de Jeff. « Des copains viennent me voir en me disant : « mais c’est moi ». En partie, car c’est un mix de plusieurs personnages. En général, ça les fait marrer ». En dix ans, 3000 vignettes ont déjà été dessinées par Jeff, pour un public fidèle.
Présent à Manosque et à Digne lors du Mondial amateur, il ne stigmatise pas le décalage entre le milieu pro et le rugby des territoires. Il se prend même au jeu de la coupe du monde, jusqu’à trouver quelques clins d’oeil qui pourraient figurer dans son livre. « Oui, les joueurs sont des machines, on voit une grande beauté du jeu. Mais on retrouve des trucs spécifiques au rugby, comme les différences entre les avants et les trois-quarts. Je me souviens surtout d’un match entre les Samoa et le Chili. Les premiers obtiennent une pénalité dans leurs 22 mètres après une mêlée… et ils redemandent une mêlée ! Même moi je n’ai pas compris ! Et de voir ça en coupe du monde, c’est fabuleux ». Jeff Teigneux n’a pas fini de trouver de quoi faire rire.
